dimanche 4 juillet 2010

Girart de Roussillon – 8

GIRART, COMTE DE VIENNE
Dit : Girart de Roussillon
De l'histoire à la légende !


Dans ce nouvel et dernier épisode de cette histoire, nous allons essayer de répondre à une question : -
Quant Girard devint-il « de Roussillon » ?

On ne sait pas avec certitude à quel moment ce nom de Roussillon fut accolé à celui de Girart Comte de Paris. Ce qui est certain, c’est que pour Girart, ce fut post-mortem, et uniquement dans la cadre de la légende de la chanson de geste.
Géographiquement, il y a deux hypothèses :
1. La région du Pilat.
2. La région pyrénéenne.

Commençons par la première, en allant faire une balade vers le massif du Pilat, situé dans l’actuel département de la Loire, frontalier avec le Rhône, l'Isère, l'Ardèche et la Haute-Loire.

Les premières traces concernant la famille de Roussillon apparaissent précisément au 11ème et 12ème siècle (soit environ 200 ou 300 ans après la mort de Girart). Elles se situent non loin de la ville du Dauphiné qui porte ce nom de Roussillon (une vingtaine de kms. au sud de Vienne), et dont l’important péage par voie d’eau et de terre, donna plus tard son nom au bourg de Péage de Roussillon.

Des écrits évoquent une famille gallo-romaine portant le nom d’ Urseolus. Elle possède des domaines dans le massif du Pilat, et dans la région de Vienne. À partir du 4ème siècle, le nom devient Russeolus.
Ensuite il ne fait guère doute, que la famille Roussillon du Dauphiné descend de cette branche Russeolus… même si les preuves écrites, historiques, irréfutables manquent encore. Même chose, d’ailleurs, pour une éventuelle venue du Roussillon pyrénéen !

Girart Comte de Paris, peut-il être l’ancêtre des Roussillon du Pilat ? Là où ça se gâte, c’est que pour être l’ancêtre d’une dynastie, il faut une descendance mâle. Or son seul fils connu, Thierry, est mort à un an.
La similitude des prénoms Girard et Gérard au sein de la famille de Roussillon, permet-elle d’envisager une filiation éventuelle ? A ce jour, pas de réponse !
Par contre, ce qui est connu, et qui caractérise la famille Roussillon du Dauphiné, c’est que celle-ci voue un culte prononcé à Sainte Marie-Madeleine, dont les reliques firent les beaux jours et la renommée de l’abbaye de Vézelay un peu grâce à Girart.

René Louis, penche plutôt pour le côté pyrénéen.
Pour lui, le Girart (de la légende) est bel et bien originaire du Roussillon, la région que nous connaissons. Il prétend que le cri de guerre des Roussillon et de leurs vassaux : « ROSSEL !!! », est en mémoire de l'antique berceau de la famille !
Castell Rosselló, l'antique Ruscino des phocéens, est situé aux pieds des Pyrénées.

Certains prétendent que c’est par là que serait passée Marie Madeleine plutôt que d'aller vers la Ste Baume... (Mais ça c’est une autre histoire !). A propos de cette autre histoire (qui fera peut-être l’objet d’un article sur le blog), voici une carte du sud de la France, qui nous amène au centre de la réflexion et des questions que se posent certains historiens …. je ne vous en dis pas plus !!

À cette époque donc, Perpignan n’existe pas, mais l’oppidum de Ruscino (actuel lieu-dit du Château-Roussillon ou Castell Rosselló), situé à l’est de la ville, est le siège de l’administration romaine de la région. Étymologiquement, Roussillon doit son nom à Ruscino. CQFD !

Pour expliquer cette origine, René Louis, suggère qu’ après les évènements de 870 (la prise de Vienne), une chanson populaire orale est née. Elle est un peu l’ancêtre des chansons de Geste. Elle aurait gardé « au chaud », pendant une centaine d’années, la mémoire des luttes entre Girart et Charles le Chauve.
Malheureusement il n’y a pas de traces écrites d’une chanson orale … (élémentaire mon cher Watson !).
Pour appuyer cette thèse, il (RL) affirme qu’il n’existe pas un seul document du 10ème siècle qui propose le moindre écrit sur Girart. Il ne reste alors que l’hypothèse de la chanson orale véhiculée par les trouvères, pour expliquer la transposition géographique de l’aventure viennoise vers la Provence et les Pyrénées, là où seraient nées les chansons écrites dont les héros sont Girart de Fraite et Girart de Roussillon.
C’est aux environs de l’an 980 que l’élaboration de la geste de Girart de Roussillon aurait eu lieu, dans l’entourage direct du duc Guifred de Roussillon, dont le pouvoir s’étend alors sur une grande partie de cette région (les Pyrénées orientales).
De là, cet embryon de chanson épique « copier-coller » de la version orale aurait pris corps, et l’identité initiale de Girart se serait vue « un chouïa » remodelée aux goûts des seigneurs de Roussillon, pour aboutir au personnage légendaire que nous connaissons maintenant un peu mieux … !
Ainsi, le souvenir des évènements de Vienne en 870, aurait été transporté oralement dans la région Pyrénéenne, et il aura fallu toute l’ingéniosité et la créativité d’un troubadour pour intégrer Girart à la généalogie d’une puissante famille du Roussillon, dont le prestige ne pouvait alors que s’accroître.

Le comte Girart ( l’ historique, le vrai ), a donné naissance (malgré lui) à plusieurs héros de chansons de Geste dont : Girart de Vienne , Girart de Fraite et Girart de Roussillon et d’autres !
Celle de Girart de Vienne correspond à un épisode vécu de la vie de Girart (on l’a vu).
La geste de Girart de Roussillon que nous revisitons depuis quelques semaines, semble être la plus ancienne des trois.

Mais ne perdons de vue que
toutes ne sont QUE des légendes.

Il a été question dans l’épisode précédent, de ce procédé employé par les trouvères-jongleurs, qu’est le renouvellement : la localisation dans une contrée que le troubadour et son public connaissent bien. Nous avons évoqué Girart de Roussillon et Girart de Vienne.
Deux mots sur Girart de Fraite.
Celui-ci est né par un simple glissement vers la Provence, une des nombreuses étapes de la fabuleuse légende de Girart, qui prend corps au gré des voyages des trouvères.
On trouve Girart de Fraite dans la Chanson d'Aspremont (nom de plusieurs villages en région PACA), vieille chanson de geste française d’avant 1190, dans laquelle il est aux côtés de Charlemagne en Calabre contre les Sarrasins.
C’est là qu’il devient Gerardo délia Fratta. Au 17ème et 18ème siècles, il devient Gérard d'Euphrate dans un roman qui trouvera encore en plein XVIIIe siècle un continuateur – (soit près de 1000 ans après la mort du vrai Girart).
Là encore des traces existent, permettant de penser que le château de Fraite soit situé à côté de Saint-Rémy de Provence. D’ailleurs, comme le suggèrent certains historiens, Fréta aurait été le nom donné au château protégeant le défilé des Alpilles vers les Baux.
Or, il y a bien longtemps, Saint-Rémy était un prieuré dépendant de Reims et le Girart historique était le protecteur de la « cité des sacres ».
Quant je vous dit : il y a toujours un p’tit quelque chose de vrai !. Des sacrés mariolles ces troubadours …. !

Alors ?
Roussillon des Pyrénées ou Roussillon du Dauphiné ???
Aucun élément ne permet de trancher en faveur de l’un ou de l’autre. Mais les historiens médiévaux s’accordent aujourd’hui pour dire que :

Girart de Roussillon
n’a aucun crédit historique.

Toute son épopée repose sur des chansons de geste, sans cesse remaniées depuis le 10ème siècle. Mais plus que tout, il ressort que :
Le comte Girart (le vrai) n’a jamais porté de son vivant le patronyme « de Roussillon ».

Pour résumer et conclure
:
Bien que décédé en 877, Girart traverse les siècles et demeure dans la tradition populaire. Plusieurs chansons de geste, en ont fait le symbole du grand vassal qui refuse de reconnaître l’autorité de son roi, et qui lui résiste en accomplissant un certain nombre d’exploits. C’est ce côté rebelle et révolté qui a permit à la légende de survivre.
Finalement, n’est-ce pas l’archétype du caractère français …. ?


Alors on reste sur notre faim ?

Ben ! oui un peu ! d’abord parce qu’on a la confirmation que, contrairement au Compte Girart, le « montage » Girart de Roussillon n’a jamais existé, et que, de surcroît, on ne sait pas exactement d’où vient ce non de Roussillon.
On a deux pistes, mais laquelle (si tant est qu’il y en ait une) est la bonne ?


Et pour re-localiser l’histoire dans notre région de Vézelay :
La bataille de Vaubeton n’a jamais eu lieu.
C’est une fiction

FIN


A bientôt pour de nouvelles aventures !
Bises à toutes et tous.
JM.



1 commentaire:

  1. intéressant article, il est juste regrettable que vous ne citiez pas vos sources. En effet, vous faites référence à de nombreuses reprises aux travaux d'André Douzet qui a écrit des ouvrages sur le Pilat et tient des sites internet dédiés au Pilat également, vous avez le devoir intellectuel, même si vous n'êtes pas d'accord avec lui, de le citer. Cela permettrait à vos lecteurs de juger par eux-mêmes.

    Bien cordialement,

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