mercredi 21 septembre 2011

Une description de Sermizelles en 1870

Extrait de : 
"Description des villes et campagnes du dept. de l'Yvonne"
Arrondissement d'Avalon 
Par Victor Petit, 1870, Ed. Gallot à Auxerre.

SERMIZELLES.

Village situé en partie le long de la rive droite de la Cure. — Pop. 342 habitants. — Superficie: 70I hectares. — A 12 kil. d'Avallon.
Fête patronale : la Nativité, 8 septembre.
Hameau: La Brosse-conche, groupe important d'habitations, situé sur la rive gauche do la Cure et traversé par une route allant à Châtel Censoir.

Sermizelles, station du chemin de fer de Cravant aux Laumes, est traversé par la route d'Auxerre à Avallon.
La route d'Auxerre à Vézelay se détache de la route d'Avallon à moins d'un kilomètre de Sermizelles. Elle s'avance en ligne droite dans la direction de l'ouest pour aboutir à un très-beau pont do pierre de trois arches, construit à quelques pas au-dessous du confluent du Cousin dans la Cure. L'ensemble du site est remarquablement pittoresque et présente tout à la fois de belles et hautes collines à demi-boisées et rocheuses, et une plaine, ou fond de vallée, couverte de riches cultures.

Ce village est très-agréablement bâti dans une plaine fertile entre la Cure et une haute colline très-rapide de pente et à demi-boisée, se détachant par deux vallons étroits du grand plateau, lui même couvert de forêts, qui s'étend entre Précyle-Sec au nord, et Lucy-le-Bois à l'est. Sur le sommet de cette colline, élevée de 98 mètres au dessus de la Cure, on remarque une tourelle à huit pans, terminée par une plate-forme crénelée au centre de laquelle se trouve un grand piédestal, servant de base à une très-grande statue de la Vierge tenant l'Enfant Jésus. La statue est désignée sous le nom de Notre-Dame-d'Orient, et la tour sous le nom de Tour-Malakof, parce que ce monument fut érigé par M. le curé de Sermizelles, peu de temps après la prise de Sébastopol : il porte la date de 1858, et l"indication suivante: J.-B. Mathieu, Arch. Nivernensis. Un sentier tracé en lacets conduit en quelques minutes à la terrasse qui précède, du côté de la vallée, ce monument commémoratif et de laquelle on découvre un remarquable panorama.

Sermizelles, Sarmisoliœ au Xne siècle, était entouré de murs autrefois et avait deux portes fortifiées. Les fossés étaient remplis d'eau par une dérivation de la Cure. Il possédait aussi un petit manoir seigneurial qui, aujourd'hui encore, malgré divers remaniements, présente comme habitation bourgeoise un aspect pittoresque ; xvne siècle.
Voici le plan de Sermizelles et l'indication de la muraille d'enceinte dont il reste encore une notable partie, mais qui est sans intérêt architectural. (Voir l'article de Précy-le-Sec.)
« Jadis le village de Sermizelles était ceint d'une muraille, couronnée par des tablettes en pierres de taille; elles avaient environ 1 mètre 50 centimètres d'épaisseur sur 5 mètres de hauteur. Huit belles tours fortifiées et garnies de meurtrières défendaient l'approche de la place; leur position,aux angles et dans les parties droites trop considérables, de larges fosses continuellement remplis d'une eau limpide, abondamment fournie par des sources bien vives, en rendaient encore l'abord plus difficile. L'entrée de la ville était défendue par un pont-levis , garni de ses accessoires et placé entre deux tours; il rappelait ainsi la disposition des ponts-levis du moyen âge. Tout cela a disparu cependant depuis peu d'années, je n'ai pu voir qu'une tour unique, à moitié renversée, mais encore garnie de meurtrières béantes.
« Les murs existent encore dans la presque totalité du pays: cependant les dalles qui les recouvraient ont disparu, Guillaume de Sermizelles les a fait enlever lors de la construction du moulin de Sermizelles, qu'il avait acheté en 1760, de l'abbaye de Saint-Martin d'Autun. » (E. Amé).

L'église est bâtie très-près de la rive droite de la Cure, vers le milieu d'une grande rue formée le long de la voie antique, dont nous allons parler tout-à-l'heure. C'est un édifice assez ancien, mais lourdement construit durant la période du xn° au xvIe siècle. On remarque les meurtrières établies dans la tour du clocher et la tourelle d'escalier. Le portail ouest, dont nous donnons un dessin, date des premières années du xne siècle. La nef n'est pas voûtée. On y voit notamment quatre petits bas-reliefs en chêne « Vie de saint Benoit » travail très-estimable, ainsi qu'un autre bas-relief représentant la Religion et la Justice.

Les maisons du côté droit de la rue principale, en remontant le cours de la Cure, sont bâties sur l'emplacement de la voie d'Agrippa qui passe sous une partie de l'église. Le prolongement de la grande rue est un vieux chemin, montant en ligne directe le versant d'une colline, après avoir longé un groupe de quatre tilleuls séculaires, ombrageant une croix do pierre de 1806, posée sur une base du xve siècle. Ce chemin, qui vient d'être élargi et nivelé, traverse en ligne droite tout le haut plateau qui domine la vallée du Cousin et occupe l'emplacement de la grande voie romaine d'Autun à Sens par Avallon et Auxerre. On peut facilement en suivre la direction entre Sermizelles et Avallon, bien que tout caractère d'appareil antique ait disparu.
Voici ce que l'abbé Courtépée dit de Sermizelles qu'il nomme Sarcitorium : « Ce lieu dont le nom est celtique est très-ancien. La voie romaine d'Autun a Auxerre y passait. On a trouvé des tombeaux, ossements et vieilles armes. M. d'Albert entreprit d'y rendre la Cure navigable par les écluses et les pertuis. Les bois et petits bateaux y passaient déja en 1666. Le flottage occupait bien des bras. On comptait alors 71 habitants. »
« On a trouvé en 1834, dans une plaine appelée Champ de la Bataille entre Givry et Sermizelles, lors d'une fouille assez profonde, des ornements calcinés et du bois en partie réduit à l'état de charbon. Lorsqu'on laboure dans cet endroit, on trouve fréquemment des fragments de belles tuiles romaines, quelquefois entières, quelques lampesen poteries ou bien en bronze et assez rarement des médailles. »

Sermizelles se trouve, comme Voutenay, au milieu des couches de la grande -oolite. Sur plusieurs points, les calcaires blancs-jaunâtres sont a découvert et renferment des pholadomyes, des panopées, des ammonites.

Avant de nous éloigner de Sermizelles, nous dirons quelques mots d'un site peu connu.
Deux chemins conduisent de Sermizelles à Blannay ; le premier, par la rive droite, qui est insignifiant; le second, par la rive gauche, qui est charmant. On passe la Cure sur un beau pont de pierre de trois arches, servant au passage de la route conduisant à Châtel-Censoir par Bois-d'Arcy. On laisse sur la droite le hameau de la Brosse Conche, et prenant un sentier longeant la Cure qui est large, limpide et bordé de massifs d'arbres, on arrive bientôt à la base d'un épais banc de rochers présentant une pente escarpée qui, plus loin, surplombe même de beaucoup l'étroit et pittoresque petit chemin qui a été prolongé sous les roches au moyen d'un petit remblai pris sur la largeur du lit de la Cure. Ce passage, nommé le "chemin de dessous le rocher"  est intéressant à étudier. Long d'une centaine de pas, nous le croyons unique dans notre département. A la sortie du défilé, on gravit la pente de la colline, en restant à mi-côte, puis on arrive à Blannay.

La population de Sermizelles était, en 1806, de 339; en 1826, de 411; en 1846, de 396.

1 commentaire:

  1. Bravo et merci Guillaume pour cette belle description de Sermizelles au 19ème siècle. L'histoire est particulièrement fouillée. Nos gens passionnés d'histoire sont pour nous des mémoires vivantes. Sans eux, nous ne saurions rien du passé de nos régions.
    Merci encore et à bientôt,
    Bises à tous,
    Gégé

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